J'utilise couramment des expressions du type "passing à 4 temps" ; cela signifie que la séquence de selfs et de passes qui se répète dans ce passing comporte 4 lancers. Par exemple, en notant P les passes et S les selfs, PSSS (un-passe), PPSS (barre de chocolat), PPPS sont des passings à quatre temps ; temps que PS (passe-passe) est un passing à deux temps. Je préfère ce type de dénomination à "un-passe" ou "passe-passe" car je trouve ces dernières peu parlantes.
Les diagrammes de causes ont été inventés par Martin Frost, l'un des "gourous" américains du passing. Ils constituent un moyen très utile pour comprendre, noter et même créer de nouveaux passings. Certaines figures n'auraient sans doute pas vu le jour sans ce type de notation.
Ces diagrammes permettent de représenter sous forme graphique la jonglerie en solo, mais ils donnent leur pleine mesure lorsqu'ils sont utilisés pour le passing. A la différence d'autres méthodes, comme les diagrammes en échelle, ils n'essaient pas de décrire la trajectoire des objets, mais simplement le moment où ils sont lancés. Ces diagrammes tirent leur nom de l'explication suivante : les lancers sont faits pour résoudre un problème, qui est de libérer la main pour recevoir une massue qui arrive vers elle. Jongler peut alors être vu comme la résolution d'une série de problèmes successifs. Ce que montrent les diagrammes, c'est la cause de ces problèmes, les solutions qui y sont apportées et les nouveaux problèmes qu'elles génèrent à leur tour.
Dans un diagramme, le temps s'écoule de la gauche vers la droite. Chaque ligne correspond à un jongleur. Les cercles représentent les mains des jongleurs, en alternance la main droite (D) et la main gauche (G). Les flêches indiquent les lancers.
Un self est un lancer pour soi, donc une flèche qui reste sur la même ligne.
Self de la main gauche vers la main droite |
![]() |
Une passe est un lancer vers un autre jongleur, donc elle est représentée par une flèche qui change de ligne :
Passe de la main droite - Self - Self - Self - Passe de la main gauche -Self - Self - Self |
![]() |
Dans le passing décrit ci-dessus, les deux jongleurs exécutent les mêmes lancers au même moment. Il s'agit du rythme basique à quatre temps, souvent appelé un-passe. Le diagramme de causes retranscrit assez bien ce que l'on ressent lorsqu'on jongle : on voit nettement sur ce diagramme qu'il y a une passe tous les quatre temps.
Les passes représentées ci-dessus sont des simples, elles sont donc représentées par des flèches qui vont d'un temps au suivant ; les doubles seront représentés par des flèches qui iront deux temps plus loin, les triples trois temps plus loin.
Pour compléter la description des passings, il faut ajouter trois notations un peu particulières :
Passer une massue d'une main à l'autre (pas de lancer) |
![]() |
Marquer une pause |
![]() |
Main vide |
![]() |
Deux de ces notations peuvent sembler très étrange, surtout la dernière : si l'on 'en tient à ce j'ai raconté plus haut, elles remontent le temps ! Sans entrer dans des détails techniques, on peut simplement retenir que la main commence à être vide à partir de la pointe de la flèche et le reste jusqu'à son extrémité droite. Des explications un peu plus "techniques" se trouvent à la section lien entre siteswaps et diagrammes de causes. Cependant, si vous n'êtes pas familier aves les siteswaps, il est préférable de lire le paragraphe suivant au préalable. Vous pouvez aussi vous contenter de lire les diagrammes avec les indications ci dessus, sans chercher à aller plus loin !
Les siteswaps sont une méthode numérique de descritpion des figures de jonglerie. Tout comme les diagrammes de causes, ils décrivent uniquement l'ordre et la hauteur des lancers successifs, pas la façon de lancer : on ne différencie pas un lancer dans le dos d'un lancer normal par exemple. Par contre, bien qu'il existe des extensions à cette notation, les siteswaps me semblent beaucoup plus adaptés à la description de figures en solo qu'au passing.
Cette méthode associe un chiffre à chaque hauteur de lancer : 3 est un lancer comme à 3 objets (cascade), 4 un lancer comme à 4 objets (fontaine), 5 un lancer comme à 5 objets, etc. Les numéros impairs décrivent donc des lancers qui vont d'une main à l'autre, les numéros pairs des lancers qui retombent sur la même main. On peut également dire qu'un 3 est un lancer qui retombe trois temps plus tard.
Pour décrire une figure, il suffit de noter les lancers successifs qui la composent. La cascade à 3 objets peut se noter 33333333333333... ce qui signifie : lancer un 3 de la main droite, puis un trois de la main gauche, puis un 3 de la main droite puis...
On peut résumer cela à la séquence répétitive la plus courte. une cascade se notera donc "3" ; une fontaine à 4 objets "4", etc.
Pour pouvoir décrire des figures plus complexe, il faut des symboles supplémentaires : le 0 désigne une main vide, le 1 une passe directe d'une main à l'autre (comme dans la "douche"), le 2 une pause.
Voici quelques exemples :
51 |
douche à trois objets |
55500 |
flash à trois objets |
3 |
mill's mess : se note comme une cascade, puisqu'on ne diférencie pas la façon de lancer ! |
Les siteswaps possèdent quelques propriétés intéressantes : par exemple, la moyenne des chiffres qui composent un siteswap donne le nombre d'objets avec lequel il se jongle.
Un petit exemple sera plus parlant : prenons le siteswap 5551 ; il comporte 4 lancers (trois 5 et un 1) et consiste en un flash suivi d'une passe d'une main à l'autre. La moyenne des lancers est ( 5 + 5 + 5 + 1 ) / 4 = 4 donc c'est une figure à 4 objets. De même, 633 est une figure à 4 objets (vous pouvez vérifier !).
Toutefois, toutes les suites de nombres ne sont pas des siteswaps jonglables : par exemple si 534 est une figure valide à 4 objets, 354 ne fonctionne pas.
Je m'explique : prenons le 534 ; s'il l'on note T0 le moment où le premier objet est lancé, il retombera à T(0+5) soit T5. De la même manière, le deuxième objet est lancé au moment T1 et retombera au moment T(1+3) = T4 et le troisième à T(2+4) = T6. En résumé, les objets lancés en T0, T1, T2 retomberont en T5, T4 et T6.
Par contre pour le 354, les objets lancés en T0, T1, T2 retomberont en T3, T6 et T6 : deux objets vont tomber en même temps sur la même main, c'est la collision ! Par conséquent, 354 n'est pas un siteswap valide.
Il s'agit donc d'une méthode qui permet de noter, comprendre et découvrir des figures, tout comme les diagrammes de causes. Quelques figures typiques des siteswaps sont les suivantes : 531, 441, 5551. Il en existe des centaines.
Pour plus d'informations sur les siteswaps, les anglophones pourront consulter le site juggling.org.
On peut utiliser les siteswaps pour noter les figures de pasing. Je ne l'ai pas fait dans ces pages, car c'est une méthode que je n'ai pas l'habitude d'utiliser.
Le plus simple est de partir d'un exemple ; le passing "de base" à quatre temps est noté comme suit :
<3p 3 3 3 | 3p 3 3 3>
Comme pour les figures en solo, chaque chiffre représente un lancer. Si un chiffre est suivi d'un p, c'est une passe, sinon c'est un self. La barre verticale sert à délimiter la suite de lancers effectuée par chacun des jongleurs. Donc dans l'exemple ci-dessus, les jongleurs démarrent simultanément par une passe en simple (3) et effectuent ensuite 3 selfs en simple (3 3 3). Et ensuite on recommence...
Un self en double, qui retombera donc sur la main qui l'a lancé, sera noté 4 ; une passe en double est notée 4p (elle va de la main droite à la main droite ou de la main gauche à la main gauche). Les triples sont représentés par des 5. Les 0, 1 et 2 ont exactement la même signification que précédemment.
Vous pouvez essayer par exemple : <4 4p 1 | 3 3 3p>
Si vous voulez d'autres exemples vous pouvez vous rendre sur ce site allemand, qui comporte une version en anglais koelnvention ou bien sur l'énoooorme site d'Isaac Orr.
Lien entre siteswaps et diagrammes de causes
On peut assez simplement relier les deux méthodes de notation, car il existe un lien logique entre elles : un lancer représenté par un pas vers la droite sur un diagramme correspond au siteswap 3 (un simple), deux pas est un 4 (un double), trois pas un 5 (un triple). La relation est donc la suivante : le nombre de pas vers la droite - 2 = le siteswap correspondant.
Les notations un peu étranges décrites ci-dessus s'expliquent alors : une pause correspond au siteswap 2, si on lui ôte 2 il reste 0 donc on n'avance pas dans le diagramme. Une passe directe de main à main est un 1, or 1-2 = -1 ce qui explique la flèche qui remonte dans le temps. De même, une main vide est notée 0, or 0-2 = -2 d'où la flèche qui amène deux temps en arrière.